Pourquoi la restauration en franchise ne peut plus miser uniquement sur l’uniformité
Quelles sont les tendances à suivre dans la restauration en 2026 ? Comment les réseaux de franchise devront-ils évoluer pour rester dans la course ? Décryptage d'un marché en pleine mutation.
Sandrine Cazan, writer
Publié le 15/11/2025 , Temps de lecture: 6 min
Restauration en franchise : les chiffres en France
Le marché de la restauration pèse lourd en France : son chiffre d’affaires atteint désormais les 80 milliards d’euros et la franchise et le secteur de la franchise y est particulièrement représenté puisqu’un restaurant sur trois appartient à une chaîne de restauration rapide. Ce segment connaît une envolée importante, avec un CA en augmentation de plus de 16% entre 2023 et 2024, selon les chiffres de la franchise 2025 fournis par la FFF.
Modèle éprouvé, la franchise représente pour de nombreux candidats un moyen d’entreprendre avec un concept structuré et une marque déjà identifiée.
Pourtant, le marché n’est plus celui d’il y a cinq ou dix ans. Les consommateurs diversifient leurs attentes, les coûts d’exploitation augmentent, la concurrence se renforce et la question du recrutement se pose avec acuité. Dans ce contexte, les réseaux ont engagé une transformation profonde de leurs modèles économiques, culinaires et opérationnels.
Finie la généralisation, place à la singularité
Pendant longtemps, les chaînes de restauration ont misé sur l’uniformité : carte stable, expérience standardisée, communication homogène. Et ça marchait ! Les clients étaient rassurés par cette offre uniforme. Mais aujourd’hui, l’équation a changé. Les consommateurs recherchent davantage de différenciation, d’authenticité et de cohérence entre l’offre, le lieu et l’histoire de la marque.
Montée des concepts spécialisés
Les enseignes positionnées sur un produit ou une catégorie forte, comme le poke bowls, le poulet frit, les burgers premium ou encore le café de spécialité connaissent une progression soutenue. La spécialisation permet de maîtriser les achats, les process et le coût matière, tout en affirmant une identité lisible.
L’arrivée sur le marché des Crousti, ou Krousti selon les enseignes, pourrait ainsi être la grosse tendance pour cette fin 2025 et 2026. Cette combinaison de riz vapeur, poulet frit et sauce, 100% instagrammable, semble se répandre comme une traînée de poudre, particulièrement auprès des plus jeunes… « Cela fait quelques temps que le Crousty monte, mais là ça devient vraiment massif. Il va continuer de se développer et gagner en notoriété, analyse Bernard Boutboul, président du cabinet de conseil en restauration Gira, sur RMC (*). Pour moi, c’est le prochain produit de masse du snacking. »
Certains réseaux de franchise, ont d’ailleurs d’ores et déjà choisi d’intégrer cette tendance à leur carte, à l’image de Chamas Tacos®, qui vient de lancer deux recettes de Crousti’z, Original et Curry.
Diversité alimentaire et évolutions sociétales
Plusieurs segments connaissent, parallèlement, une demande accrue :
- offres halal ou à forte identité culturelle,
- cuisines du monde,
- options végétariennes ou véganes,
Pour les réseaux, il ne s’agit pas seulement d’ajouter des recettes à leur carte, mais d’ajuster la promesse globale : sourcing, discours, formation.
Vers des identités de lieux moins uniformes
Un autre mouvement se confirme : les réseaux assouplissent progressivement les codes architecturaux et décoratifs de leurs restaurants. Là où les chaînes misaient auparavant sur un cadre homogène, avec les mêmes matériaux, mêmes couleurs, même mobilier, les concepts actuels tendent à offrir une marge de personnalisation locale. Cette évolution répond à la fois à une recherche d’authenticité et à une volonté d’intégrer le restaurant dans son environnement immédiat.
Les franchiseurs définissent ainsi un cadre modulable (palette, matériaux, ambiance), tandis que les franchisés peuvent apporter des touches distinctives : illustrations murales, choix d’objets décoratifs, références locales.
L’objectif est de préserver la cohérence de l’enseigne tout en permettant un ancrage territorial crédible.
McDonald’s et Bagelstein assouplissent ainsi leurs codes décoratifs pour permettre un ancrage local plus authentique. Autre exemple avec les établissements Big Mamma ou encore Antonio & Marco. Aucun des restaurants de ces deux groupes ne porte le même nom ni ne se ressemble. Pourtant, ils arrivent tous à dégager le même état d’esprit. Et c’est ce que veulent les clients !
Digitalisation : un impératif structurel, du parcours client à la cuisine
La digitalisation ne se limite plus aux outils marketing. Elle traverse l’ensemble de la chaîne de valeur : commande, paiement, production, livraison, fidélisation et analyse des performances.
Un parcours client fluide et multicanal
Bornes tactiles, applications, programmes de fidélité intégrés et tablettes en salle se généralisent. Le client doit pouvoir passer de la commande en ligne au retrait en restaurant sans friction. Le click & collect et la livraison occupent une part croissante du chiffre d’affaires.
Chez O’Tacos, par exemple, 2025 a été l’occasion de mettre en place une application mobile avec un programme de fidélité, des bornes de commandes interactives en restaurant pour fluidifier le parcours client, un service de click & collect, de click & chill et de drive pour répondre toujours mieux aux attentes des clients… et des franchisés !
Optimisation opérationnelle et nouveaux formats
La recherche de flexibilité favorise :
- les dark kitchens
- les kiosques et corners
- les food trucks
Ces formats limitent l’investissement initial et permettent une implantation progressive sur un territoire. Parallèlement, l’automatisation se déploie sur certaines tâches répétitives pour améliorer la constance et la rapidité.
Expérience augmentée
Certains concepts misent sur l’immersion ou la mise en scène du lieu pour créer une expérience distinctive.
Le restaurant devient destination, et non simple point de consommation.
Depuis sa reprise par le Groupe Bertrand, la franchise Pitaya va ainsi au-delà de la simple cuisine au wok : ses restaurants reprennent les codes des échoppes traditionnelles thaïlandaises, pour plonger le client dans l’effervescence de cette vie asiatique.
Durabilité et responsabilité : un nouveau critère de choix
La question environnementale est désormais structurante dans les décisions d’achat et dans l’attractivité des réseaux auprès des franchisés.
Approvisionnement et gestion des matières
Les enseignes travaillent sur des gammes plus courtes, un sourcing plus maîtrisé, la réduction des pertes en cuisine et l’usage d’emballages réutilisables ou recyclables. Basilic&Co, par exemple, met un point d’honneur à valoriser des produits emblématique du terroir, s’engageant sur des circuits courts et la mise en avant de savoir-faire local.
Capital humain : un enjeu majeur et durable
La restauration fait face à une pénurie de main-d’œuvre, c’est un fait et c’est aujourd’hui l’un des premiers facteurs de fragilisation du modèle. L’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (Umih) estimait ainsi à l’été 2025 qu’il manquait 200.000 travailleurs pour contenter les besoins du marché !
Il s’agit donc de repenser l’attractivité du secteur. Pour tenter d’attirer à nouveau des candidats vers la restauration, les réseaux révisent conditions de travail, formation initiale, montée en compétences et perspectives internes. Plus encore que dans n’importe quel autre secteur d’activité, l’enjeu est la fidélisation des collaborateurs.
Au-delà du transfert de concept, les franchisés attendent : des outils RH, du soutien au recrutement, de la formation continue, et un accompagnement à la gestion multi-sites.
La restauration : un modèle porteur, qui va devoir s’adaptater
La franchise reste un mode solide de développement dans la restauration. Mais sa pérennité repose désormais sur sa capacité à trouver un équilibre entre identité de marque, adaptation locale, maîtrise économique et qualité d’expérience. Il est important de garder ces notions à l’esprit si vous souhaitez vous lancer sur le marché de la restauration en franchise dans les mois à venir !
Sandrine Cazan, writer
