GMS : L'Insee décrypte les taux de marges commerciales
Dans une récente publication, l'Insee s'est penché sur les taux de marges commerciales des grandes surfaces. Il ressort de cette analyse deux grands enseignements : les taux de marges sont homogènes d'une grande surface à l'autre, plus les parts de marché sont élevées et plus le taux de marge est réduit.
Dominique André-Chaigneau, writer
Publié le 05/12/2015 , Mis à jour le 02/11/2021, Temps de lecture: 6 min
Si depuis quelques années, la bataille sur les prix fait rage dans les rayons des supermarchés et hypermarchés, au final, lorsque les taux de marge commerciale sont mis à plat, force est de constater que les marges de manœuvre sont assez limitées ! C’est à cette conclusion qu’arrive l’étude publiée récemment par l’Insee.
Des taux de marge commerciale fortement corrélés aux familles de produits
Selon le constat de l’Insee, le taux de marge commerciale pratiqué par les hypermarchés et supermarchés varie fortement selon le type de produit. Ces taux varient entre 2% et plus de 20% ! Parmi les produits sur lesquels les marges commerciales sont les plus faibles, l’on retrouve notamment les carburants/lubrifiants « qui représentent 16% des ventes des supermarchés, mais seulement 2% de leur marge commerciale globale », vs 8% chez les stations-services.
Pourquoi si peu ? Clairement, le carburant est typiquement le produit où la concurrence fait rage. Les stratégies d’enseigne sur ce type de produits homogènes portent « principalement sur les prix pour attirer le consommateur. » On est là sur un produit d’appel sans différences de gamme. « Le taux de marge est également relativement réduit pour l’équipement informatique ou de communication (10%).
À l’opposé, il est plus élevé pour l’équipement de la personne et celui de la maison, qui contribuent quasiment à la même hauteur aux ventes et à la marge commerciale des grandes surfaces. » Dans le détail, comparé au commerce spécialisé, l’écart de taux de marges se creuse sur les produits non alimentaires (de l’ordre de 10 à 20 points selon la famille de produits). « Ceci tient sans doute en partie à un assortiment différent en gammes, à leurs achats en grande quantité, voire à leur structure spécifique de coût (un nombre de vendeurs par m2 réduit). »
Du côté des produits alimentaires, les taux de marge sont compris entre 13 et 27% dans les hypermarchés et supermarchés et proches d’une famille de produits à l’autre. Les taux de marge s’envolent lorsque les produits sont rapidement périssables ou nécessitent un équipement spécifique (congélation, cuisson…), demande plus de surface de stockage ou davantage de personnel dédié au rayon. « À l’inverse, ils sont plus modérés sur les boissons, qui se conservent plus longtemps et se stockent facilement (13%). »
Face au commerce spécialisé, les surgelés se distinguent par un taux de marge élevé, mais nettement inférieur aux spécialistes du secteur. «Le taux est plus proche du commerce spécialisé pour les produits frais, en particulier les fruits et légumes : pour ces derniers, la marge commerciale des supermarchés est voisine globalement de celle des primeurs.»
En résumé, les principaux taux marges dans l’alimentaire sont en moyenne :
- Surgelés : 26% en supermarchés, 27% en hypermarchés, 35% en commerces spécialisés
- Fruits et légumes : 25% en supermarchés, 24% en hypermarchés, 34% en commerces spécialisés
- Viandes : 26% en supermarchés, 26% en hypermarchés, 39% en commerces spécialisés
- Poissons : 20% en supermarchés, 23% en hypermarchés, 38% en commerces spécialisés
- Pains et pâtisseries : 25% en supermarchés, 26% en hypermarchés, 51% en commerces spécialisés
- Boissons : 13% en supermarchés, 14% en hypermarchés, 35% en commerces spécialisés
- Autres produits alimentaires : 20% en supermarchés, 22% en hypermarchés, 38% en commerces spécialisés
Et hors alimentaire :
- Carburants : 4% en supermarchés, 2% en hypermarchés, 20% en commerces spécialisés
- Informatique et communication : 15% en supermarchés, 13% en hypermarchés, 30% en commerces spécialisés
- Équipement de la maison : 22 % en supermarchés, 24 % en hypermarchés, 43 % en commerces spécialisés
- Culture et loisirs : 19% en supermarchés, 20% en hypermarchés, 33% en commerces spécialisés
- Équipement de la personne : 21% en supermarchés, 23% en hypermarchés, 45% en commerces spécialisés
- Boissons : 13% en supermarchés, 14% en hypermarchés, 35% en commerces spécialisés
- Autres produits alimentaires : 20% en supermarchés, 22% en hypermarchés, 38% en commerces spécialisés
Les écarts de marge entre grandes surfaces sont restreints
Si sur quelques familles de produits les taux de marges jouent le grand écart entre les grandes surfaces et le commerce spécialisé, entre grandes enseignes de la GMS, les écarts sont beaucoup moins significatifs.
Ainsi, comme le note l’Insee, les taux de marge commerciale sont proches pour les carburants, boissons et produits surgelés, et dans une moindre mesure pour les fruits et légumes, viandes et poissons. Les écarts se creusent pour les produits de boulangerie/pâtisserie, l’équipement de la personne, l’équipement informatique et de communication, celui de la maison, ainsi que les autres produits alimentaires. « Cette hétérogénéité renvoie à celle des produits fins qui composent ces familles de produits : selon l’assortiment vendu en magasin, le taux de marge, mesuré ici à un niveau relativement agrégé de produits, peut être assez différent. »
A l’inverse, l’Insee note que dans ce type de commerces, les marges sont assez homogènes quelque soit la taille de l’entreprise. Cela est principalement du au fait que les entreprises sont regroupées le plus souvent en réseau : « quelle que soit leur taille, les grandes surfaces se fournissent principalement auprès d’une centrale d’achat, laquelle appartient presque toujours à un grand groupe de distribution. Seules les plus petites unités se singularisent par un approvisionnement direct plus conséquent auprès de producteurs. »
Des taux de marge commerciale fortement corrélés au poids des ventes
Selon l’Insee, en grande surface, les taux diminuent quand la part du produit dans les ventes augmente. Dans le détail, « dans les hypermarchés et supermarchés, le taux de marge du produit tend à diminuer quand les quantités écoulées sont importantes ». En clair, le volume des ventes influence directement le taux de marge. « Un haut niveau de ventes autorise un taux de marge réduit : celui-ci peut attirer le consommateur, la marge globale étant préservée par l’effet quantité. » Mais le seul effet volume n’est pas le seul à influencer directement sur le taux de marge commerciale .
Dans les faits, la fixation des taux de marge est plus subtile puisqu’en effet, selon l’Insee, « plus encore que les ventes du produit, c’est leur part dans les ventes globales de l’entreprise qui apparaît fortement corrélée négativement au taux de marge commerciale ».
En clair, un supermarché ou un hypermarché qui vend peu de poissons par exemple (moins de 1% des ventes) aura tendance à moins tirer sur ses marges qu’une grande surface qui en vend beaucoup.
Sur une même famille de produits, la marge commerciale pourra donc fortement varier d’une grande surface à l’autre selon le poids des ventes de ce produit dans les ventes globales.
Cela vaut pour les produits alimentaires en particulier pour la boulangerie/pâtisserie /confiserie, les boissons mais aussi pour les produits non alimentaires comme l’équipement de la maison. D’autres produits affichent des marges identiques ou proches quelque soit le volume de ventes comme notamment les carburants et l’équipement de la personne,
Deux exemples pour bien comprendre :
- Poissons (différentiel de 28 à 18%) : Quand les ventes représentent moins de 1% des ventes globales, la marge s’établit à 28%. Elle baisse à 23% quand les ventes représentent entre 1% et moins de 2%, atteint 21% entre 2 et moins de 5%, et 18% entre 5 et moins de 10%.
- Pains et pâtisseries (différentiel de 46 à 15%) : Quand les ventes représentent de 1% à moins de 2% des ventes globales, la marge s’établit à 46%. Elle baisse à 37% quand les ventes représentent entre 2% et moins de 5%, atteint 25% entre 5 et moins de 10%, 20% entre 10% et moins de 20%, et 15% entre 20 et moins de 30%.
Dominique André-Chaigneau, writer